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La coulée d'Oc partie Charente
Je vais vous parler d'un temps définitivement révolu. C'était le temps d'avant-hier. Loin, très loin des préoccupations et tracasseries de notre époque actuelle du temps d'un après corona envisagé cet été. Il s'agit de l'histoire d'un tout petit morceau du grand maillage du réseau des chemins de fer de France et de Navarre du XIXe et XXe siècle. L'histoire d'une voie ferrée devenue aujourd'hui voie piétonne et cycliste "Coulée d'Oc".
Cette voie côtoie une charmante petite rivière, "Le Bandiat" qui recèle de splendides passages à gué romain.
Ouverte en 1883, désaffectée voyageurs en 1946 et abandonnée à la décrépitude en 1986, cette ancienne voie ferrée qui reliait le Quéroy à Nontron fut un temps très utile pour les échanges de marchandises et de relations humaines entre Angoumois et Périgord.
Officiellement ouverte le 12 décembre 1881, elle aura nécessité 4 années de durs travaux entre Le Quéroy en Charente et St Martin le pin en Dordogne. Le prolongement jusqu'à La ville de Nontron en Dordogne fut finalement reliée à la Charente par cette voie ferrée le 5 août 1883. Sur les 19, 203 km de la partie charentaise, il aura fallu déblayer et remblayer manuellement des centaines de tonnes de terre et dynamiter tout autant de rochers . Dix maisonnettes de gardes-barrières et deux gares « Chazelles » et « Marthon » jalonnent ce parcours.
La gare de Chazelles de type « Charente » possède une halle en bois et permet les premières années de transporter quotidiennement du bétail. Certains trains spéciaux sont affrétés les jours de foire le 7 de chaque mois pour Chazelles et le 21 pour Marthon. En 1886, l'entreprise Dubroca, une importante scierie de pierres située au moulin Rigolland, construit un portique et une vingtaine de mètres de voie ferrée pour le transport des lourds blocs de pierres. Ce portique en cours de classement a fonctionné jusqu'en 1960.
Par ailleurs cette voie réhabilitée depuis peu en voie verte, baptisée "Coulée d'oc", pour piétons et cyclistes a connu les heures sombres de la deuxième guerre mondiale. Entre juin 1940 et novembre 1942, Elle franchissait la triste ligne de démarcation, véritable frontière intérieure établie par l'occupant allemand suite à l'armistice du 22 juin 1940. La partie Nord était qualifiée de « zone occupée » par les autorités militaires et de polices allemandes . La partie sud « zone libre» regroupait 68 communes du département de Charente, dont Confolens. Ce territoire charentais libre fut arbitrairement rattaché administrativement à la préfecture de Limoges.
Passer clandestinement cette ligne de démarcation n'était pas sans risques d’arrestations, d'emprisonnement, de déportation et même de mort. Des passeurs de courriers, des prisonniers de guerre évadés, des fugitifs, des familles juives et autres multiples personnes n'ont pas hésité à franchir l'interdit. Ce fut les résistants de première heure. Hélas le 11 novembre 1942, la zone libre fut envahie. Charente et France furent alors totalement occupées. A la libération, les 68 communes de Charente retrouvèrent définitivement leur attachement à la préfecture d'Angoulême.
Aujourd'hui dimanche 14 mars 2021, mon épouse et moi avons parcouru à pieds une mince portion de cette charmante voie judicieusement bien restaurée. Des milliers de stellaires, en voie lactée terrestre, nous ont accompagné afin de ne pas perdre le nord du sud de cette zone définitivement libérée.
Bonne semaine à toutes et tous.
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Commentaires
2Marie LabordeLundi 15 Mars 2021 à 20:59Bonsoir cher Michel, merci pour ce moment historique sur la voie ferrée devenue "Coulée d'Oc". Lorsque je me suis retrouvée au milieu des fleurs, que tu as rappelé que nous sommes le 14 mars, j'étais encore dans la période néfaste guerrière, la délivrance a été plutôt agréable, dans mon domaine favori, la belle et douce nature. Ton récit de cette douloureuse période m'avait transportée ailleurs, mon imagination étant très féconde. Les stellaires sont des fleurs merveilleuses, d'un blanc éclatant, comment ne pas les aimer ! Merci pour ce merveilleux moment, bonne soirée, je t'embrasse. Marie.
Merci pour ce reportage très instructif et cette offrande de stellaires merveilleusesChez moi aussi, une voix ferrée a été transformée en chemin de rando...mais la laisser en terre battue eut été trop beau, trop campagne...!!!Il a donc fallu l'"aménager", la rendre bien droite, couper tous les arbres qui dépassaient"... La campagne ? Que nenni ! La ville à la campagne, oui ! c'est à désespérer !
Bonjour et merci pour ce magnifique partage avec ces très jolies photos et ces fleurs des jolies beautés j'adore bonne journée bisou Claudine Daniel
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Je les aime tellement, ces stellaires, et comme tu les décris bien "en voie lactée" ! Ces coulées verdoyantes sont de merveilleux exemples de restauration, qui me réconcilient - un peu - avec notre temps. Ils sont souvent le théâtre faussement abandonné de nouvelles et originales pièces de verdure. Le sol particulier des chemins de fer fait un biotope bien particulier, précieux à l'étude comme à l’œil.
Merci pour cet avant-hier, comme un voyage.
Bonne semaine, Michel !
Pierre.