• L'ordonnance royale qui prescrivait de planter les routes de tilleuls et d'en réserver la récolte pour l'usage des hôpitaux était oubliée depuis longtemps des habitants du lieu dit "Le Gros Pierre" lorsque je suis né . Un brave homme de cet endroit qui aimait les arbres et qui longeait "La grande versenne" s'est dit un jour qu'un tilleul serait le bienvenu ici . Je suis donc né juste après la deuxième guerre mondiale du 20è siècle . Planté et bichonné durant mes premières années de vie de tilleul , mes branches se sont peu à peu déployée entre "Grande Versenne" et "Croix de Filloux" , pour offrir aux passants et paysans une ombre fraîche et bienfaisante .
     
    Mais un jour du début des années 1960 , j'ai commencé à trembler de frayeur ; la ville s'est s'est installée côté "Croix de Filloux". La cité des "Grands champs" a sonné le glas de mes frères les chênes et ormeaux . L'allée des chênes est devenue rue Gambetta , le chemin des fosses rue du Souvenir ,  le chemin des " Mérigots au Gros Pierre  rue Emile Zola . Côté nord , le décor du monde urbain est planté , celui des  grands arbres remarquables est compté . Mais durant encore cinquante ans j'ai continué ma croissance sans aucun autre incident grâce au côté sud , la partie Grande Versenne toujours en version agricole . En ce mois de juillet 2009 , j’atteins le sommet de ma gloire , je suis devenu un tilleul remarquable à faire pâlir d'admiration plus d'un quidam aimant les grands arbres !...

    L'été s'achève et brutalement en septembre , un horrible broyeur débarque sur la "grande versenne " et dans un bruit infernal en trois jours détruit toute la végétations qui m'entoure . Puis aussitôt des engins ultra lourds : pelleteuses , camions benne géants , tracteurs énormes , rouleaux vibreur-compresseur  conçus pour trancher la campagne afin de réaliser des autoroutes ou Lignes ferroviaires à grande vitesse , décapent en un clin d'oeil ma "Grande Versenne". Même  la grange au "père Brault" qui me protège des rudes vents d'ouest d'hiver est démantelée et rasée .

    Mais non content de me faire subir cet affreux spectacle , un après-midi d'octobre 2009 , une équipe qualifiée " entretien espaces verts communaux" arrive avec  un camion nacelle . Je tremble de toutes mes feuilles , moi qui a pourtant bravé la tempête de 1999 , car ce camion s'arrête au droit ma houppe . deux hommes "jaune fluo" commencent à tronçonner toutes mes branches basses . Durant deux après-midi , cet outil tranchant au son strident dévore mes branches inférieures les plus précieuses qui me servent de protection pour mon tronc et mes racines durant les canicules d'été .


    Je suis aujourd'hui tout nu , avec seulement ma houppe supérieure prête à subir les assauts faciles d'une prochaine tempête . Moi qui avait su si bien déjouer jusqu'à présent ces coups de vents d'ouest ,  je suis désarmé . 


      Côtoyantune "grande Versenne" toute chamboulée , je vais dépérir . D' arbre remarquable , je suis maintenant un arbre saccagé . La sottise des hommes a fait son œuvre macabre sur mes frères et moi qui ne pouvons crier de douleur . Je meurs dans l'indifférence générale , signe de cette époque dite moderne .
      


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  • " L'air qui entoure chaque mots ,
    c'est le silence réfléchi de celui qui écrit . 
    J'ai confiance .

    Quand il y a un mur de livres dans une pièce ,
    je me sens à l'abri.
    Plus sûre que derrière toute porte blindée "
                                           Jeanne Benameur
     


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  • Pour faire moins compliqué , il s'agit de l'oeillet des chartreux . J'ai rencontré celui-ci , dans une carrière désaffectée à l'Isle d'Espagnac , 24 heures avant sa disparition définitive sous 15 mètres de gravats et de terre mélangée . En effet nous avons soliloqué quelques instants ensemble , moi en pestant car je savais que le lendemain il ne serait plus , lui dans sa langue muette pour nous les humains , ne comprenant pas pourquoi il serait si vite recouvert d'une aussi épaisse couche de granulats calcaire .
    Ainsi va la vie , ainsi la biodiversité fout le camp !...







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  • "Je cherche le sol primitif .
    Une trace d'avant le vacillement du monde "
                                 Florence Noiville

                                                                                                                 
                                                      Biodiversité , ton avenir est compromis
                                                                                         Canardjaune 
                 

    A cet endroit , mon regard a croisé ce papillon , la veille de la destruction de cette pièce de terre qualifiée de "dent creuse" par l'architecte , mais de "miracle de vie" par Canardjaune . Nous ne parlons pas le même langage , nous n'avons pas les mêmes valeurs !....  

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    """S’il y a des silences qui font le malheur des uns , il est des mots et des partages qui agrandissent le meilleur de ceux qui acceptent de se dire . Quand il y a le silence des mots se réveillent trop souvent la violence des maux . Mais il ne suffit pas de rompre le silence , et de sortir du mutisme , encore faut il se sentir reçu , entendu et amplifié lors de ses tâtonnements à mettre en mots .


    Il y a des mots vibrants de vie , des mots ferveur pour l’amour , des mots patience ou enthousiastes pour la compassion , des mots de tolérance pour la liberté d’être .
     

    Il y a des mots porteur de mort et de violence chargés de haine et d’inimité ;


    Il y a des mots simples et nécessaires du quotidien et les mots rares de l’exceptionnel , les mots familiers de la banalité , et les mots précieux de l’extraordinaire .


    Il y a les mots économes de la survie et ceux dont la richesse nous transporte vers le meilleur de l’autre et de nous-même .


    Il y a des mots obscures , hésitants , torturés , des mots balbutiant et aussi des mots posés et confiants déjà , plus matures , plein de sagesse et de sérénité , lourds de tout leur poids d’espoir et du sens profond qu’ils portent . Il faut déjà du temps pour qu’un ressenti , une émotion , un vécu trouve le chemin des mots ...."""

    Extrait d'un texte de Jacques Salomé 
    Photos : Jardin de Canardjaune


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